Green skills, les entreprises ne vont plus pouvoir faire l’impasse
Bilan carbone, analyse du cycle de vie des produits, gestion des déchets, analyse des données, mise en place de politiques RSE : la transition écologique crée des emplois et redéfinit les compétences. Comprendre cette dynamique devient crucial pour les entreprises, qui doivent à la fois répondre aux normes réglementaires, et aux attentes des équipes comme des client.e.s.
Les métiers « verts » ont déjà le vent en poupe !
Depuis quelques années, l’on assiste à un développement sans précédent des métiers dits « verts », c’est-à-dire des métiers à finalité environnementale ou métiers à impact. Les métiers cadres de l’énergie sont de loin ceux pour lesquels la demande augmente le plus. Et le récent accord conclu à la COP 28, qui a fixé comme objectif de tripler les capacités des énergies renouvelables d’ici 2030, va booster la demande. Les chef.fe.s de projet photovoltaïque, les ingénieur.e.s hydrauliques, les responsables HSE ou encore les ingénieur.e.s environnement, pour n’en citer que quelques-uns, sont des profils de plus en plus recherchés, et seront les « stars » du marché de l’emploi de demain. De nouvelles compétences dites « verdissantes », qui viennent transformer des métiers existants, émergent également. La notion de « verdissement » des métiers s’applique par exemple à un ou une professionnelle de la vente BtoB qui renforce sa connaissance produit sur l’impact environnemental (provenance, durabilité, recyclabilité, réparabilité, performance énergétique), à un ou une communiquante qui devient expert·e du risque de greenwashing, à un ou une comptable qui intègre les mesures non financières, ou encore à un ou une juriste qui se spécialise en droit environnemental.
Mais en réalité, peu d’entreprises ont conscience des enjeux internes en termes de compétences
D’après la dernière étude de l’Apec sur le verdissement des métiers cadres, seules 13 % des entreprises anticipent aujourd’hui les impacts de la transition énergétique en matière de besoins en compétences et ressources humaines. Pourtant, les entreprises ont tout intérêt à prendre les devants, et à faire évoluer leur agenda RH pour répondre aux besoins en compétences de demain.
D’abord, parce que la pression réglementaire s’accentue – Stratégie Nationale Bas-Carbone (SNBC), Convention citoyenne pour le Climat de 2019, loi Climat et Résilience de 2021, COP 28, feuille de route de planification écologique du gouvernement – et que les entreprises doivent désormais engager un certain nombre d’actions pour se mettre en conformité. Ensuite, parce que les clientes et clients attendent aujourd’hui des pratiques plus durables de la part des entreprises. Pour Antoine Poincaré, VP de la Climate School d’AXA Climate, « qu’il s’agisse des consommatrices et consommateurs finaux, qui peuvent boycotter une marque, ou des clients BtoB, qui accentuent leurs exigences en matière d’empreinte carbone dans leurs cahiers des charges, les clients influent de plus en plus fortement sur les pratiques des entreprises ».
Pression des lois, des clientes et clients… mais aussi des talents à recruter. Car les cadres estiment que l’engagement sociétal de l’entreprise est un critère à prendre en considération au moment de choisir un poste. Ainsi, 56 % des cadres peinent en 2023 à se projeter dans une entreprise qui ne fait pas d’efforts pour réduire son impact environnemental, et 68 % n’envisagent pas de rejoindre une entreprise dont l’activité est jugée néfaste pour l’environnement. C’est donc à plus d’un titre que les entreprises doivent engager leur « virage vert » et faire de leur stratégie RH – recrutement et formation – un levier au service de la transition écologique.
Anticiper… oui mais comment ?
Si vous souhaitez donner à votre entreprise les moyens d’un vrai changement d’approche, la première étape est d’établir pour chaque métier la feuille de route de son « verdissement ». Cela passe par des réunions avec les équipes opérationnelles, pour se poser les bonnes questions et identifier les compétences vertes nécessaires. Pour Antoine Poincaré, « il est important d’avoir une approche métier par métier, car les enjeux et les niveaux de maturité ne sont pas du tout les mêmes selon les fonctions. Les compétences vertes d’une équipe IT ne seront pas du tout les mêmes que celles des achats, par exemple. La démarche doit se faire à la maille du métier ». Pour vous inspirer, n’hésitez pas à consulter l’étude de l’Apec sur le verdissement des métiers cadres, qui montre les impacts, en matière de missions et de compétences, de la transition écologique sur 13 fonctions professionnelles.
Une fois les compétences clés identifiées, l’objectif est bien sûr de les développer au sein de votre organisation, à travers des plans de recrutement ou de formation adaptés. Concernant la formation, différentes approches sont possibles et cumulables : des formations de quelques heures par semaine destinées à l’ensemble des collaborateurs et collaboratrices pour les acculturer aux enjeux de la transition écologique ; des programmes de moyenne durée (entre 10 et 20 heures) pour permettre aux salarié·es de « verdir » leur métier à travers l’acquisition de nouvelles compétences (par exemple, à un directeur financier de se former au reporting extra-financier) ; des programmes plus poussés (d’une centaine d’heures) destinés aux équipes souhaitant se reconvertir vers des métiers à impact.
« Ces actions visant au verdissement des compétences, pour être pleinement efficaces, doivent être corrélées à une réflexion plus globale de l’entreprise sur son "devenir vert" », précise Antoine Poincaré, qui insiste sur la nécessité de « développer un récit écologique plus large », indispensable pour fixer le cap de votre transition écologique.